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haiku scato

 

Cet haiku m'est venu en réponse au commentaire d'un ami sur un portrait intitulé "le gourou" et que j'avais publié il y a quelques années ... Une situation vécue d'ailleurs.

Le Gourou

La façade du supermarché réverbère des éclats de soleil qui rythment la danse colorée d'un manège d'enfants.
C'est le premier vrai jour d'été dans ce bourg au bord de la côte fleurie où je viens régulièrement goûter au plaisir de ne rien faire.
Les portes de verre s'ouvrent et se referment, balayant la lumière pour laisser passer des silhouettes bigarrées, que les cabas et les cartons déforment et qui sourient à la tiédeur de ce matin de juillet.
Je suis planté sur le trottoir d'en face, à l'ombre d'une villa d'autrefois, de ces temps où les dames portaient des costumes de bain à volants.
Sous un porche à coté de moi, une femme attend,avec son chien, un « Cavalier King Charles » à l'air effronté . Elle a un regard désabusé et je me demande qui, du chien ou de la femme, tient l'autre en laisse.
Les portes de verre s'ouvrent et se referment.
Il m'est apparu.
Ses cheveux blanc bien tirés captent la lumière et la guident le long de ses épaules sur une tunique de lin. Ses yeux clairs déclinent chaque variation des couleurs du manège d'enfants que fait ressortir plus encore une longue barbe lisse et immaculée.
Ce n'est pas le délicieux désordre de la tenue du père Noël. Ce n'est pas son sourire bonhomme.
Lui, c'est un gourou.
Il arbore le sourire figé d'un Christ qui aurait refusé la Passion pour ne devenir qu'un Narcisse vieillissant.
Je suis fasciné par son masque.
Je lui invente une infinité de vies qui scintillent dans les saccades d'un kaléidoscope.
Il est Merlin l'enchanteur bien peigné. Puis le voilà grand couturier ou encore l'abbé Faria ressuscité.
Mais il traverse la rue et vient vers moi d'une démarche lente qui glace cette pluie d'images.
Je ne vois plus alors que son short de coton ample déborder de sa tunique et ses sandales made in China traîner au bout de deux jambes savamment bronzées.
L'homme me dépasse sans me voir.
Il fait encore quelques pas puis s'arrête devant la femme au Cavalier King Charles.
Il lui tend son sac plastique d'où dépasse le bout d'une baguette de pain et, lui prenant la laisse des mains :
« Alors il a chié le chien, éructe-t-il ? »

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