Des urnes pleines de désillusions

Ma chère Elise, 

Jean Luc Mélenchon ne sera pas premier ministre et les médias nous inventent aujourd'hui, ou relayent simplement, un nouveau suspense :

Monsieur Macron, talonné par la NUPES, aura-t-il la majorité absolue ?  

Pour ma part, j’espère bien que non. Et qu’il sera contraint de composer avec un parlement qui retrouvera enfin un peu de vigueur, même si je suis conscient de ce que ses alliances le conduiront probablement plus à droite encore qu’il ne l’est, pour autant que ce soit possible. 

Mais il est un autre suspense dont on ne parle pas encore aujourd’hui : Jusqu’à quels nouveaux records l’abstention et les vagues de chaleur qu’on nous annonce pour cette semaine vont-elles nous mener?

Quand allons-nous enfin tirer les conséquences de ce que notre coquille démocratique se vide peu à peu de toute sa substance et que la consommation effrénée de nos ressources, pour ne fabriquer que de l’accessoire et la richesse insolente de quelques-uns, va vider peu à peu notre planète de son humanité ?

Tu le vois, ma chère Elise, je suis d’humeur pessimiste, et même résolument grognon en ce lendemain d’élections. 

 Devoir constater que plus de la moitié de mes concitoyens ont été poussés à se désintéresser de la chose publique ne me réjouis pas. Pas davantage que voir Nathalie Samson, dont j’ai souligné la fraîcheur et la sincérité, ne pas accéder au second tour; ni imaginer que l’on en conserverait un député macronien connu surtout pour son absence, ce que montre bien son score calamiteux quand bien même il le porte à la seconde place; ni que se confirme l'emprise croissante du rassemblement national dans le département où je vis et où je me suis engagé depuis plus de trente ans...

Comment voudrais-tu que je ne sois pas grognon? 

Je pourrais tenter de rêver à un sursaut populaire qui vienne encore bousculer dans la semaine un résultat de second tour annoncé. Mais j’ai bien peur que ne se soit grippée, et pour longtemps, la machine à rêver. 

Monsieur Macron disposera bien d’une majorité à l’Assemblée nationale, sans doute relative. La NUPES s'y constituera en principale force d’opposition. Le rassemblement national y renforcera son ancrage. Et ce qui restera de la droite traditionnelle soutiendra au coup par coup la politique macronienne que mettront en oeuvre quelques-uns de ses transfuges.  

Tout cela sous la canicule puis sans doute de violents orages, et  cependant qu’une majorité de plus en plus écrasante de Français aura boudé les urnes.

Quant au président de la République, il continuera de s’ériger en soi-disant rempart contre des extrêmes qu'il a lui-même cultivés pour certains et maquillés pour d'autres. 

J’ai ajouté à son rempart la brique de ma toute petite voix au second tour de la Présidentielle. Je ne voulais en effet ni du risque, ni de la honte d’une présidence d’extrême droite.  

Mais s'agissant de l'élection législative, Je sais qu'il y aura demain de toutes façons un groupe du rassemblement national à l'Assemblée, parce qu'ils sont quelques millions de Français à le soutenir. J'essaye de me rassurer en me disant qu'il ne disposera pas pour autant du pouvoir ... En tout cas pas encore ! 

Et si c’est ce que veut la France !

C'est la première fois ma chère Elise que j’envisage vraiment de voter blanc dimanche.

Je ne sais pas encore si je saurai le faire. C’est te dire à quel point je désespère. 

Bien à toi.