6 Février 2018
Rédigé par Sogsine et publié depuis Overblog
La pointe du clocher émerge de la brume.Il me suffit de quelques pasLe long de ces fossés où l'aube encore fume,Et je serai enfin là-bas.J'y suis venu souvent, des rêves plein la tête,Au point d'en oublier le temps.Des fous qui vivaient là j'imaginais les fêtes,Autour de grands feux éclatants.On les avait cloitrés au dehors de la villeDans un hameau bâti par eux,Que l'on a qualifiés de fous ou de débiles, Et pour certains de dangereux.Sur la place, on a érigé une églisePour qu'ils demeurent enfants de Dieu.Mais c'est le murmure des arbres dans la briseQui verse le ciel dans leurs yeux.La mort enfin les a conduits loin de l'asile,Rejoindre pour l'éternitéCes croix blotties autour d'un calvaire immobileAu cimetière des oubliés.Ce n'est plus aujourd'hui qu'un entrelacs de ronces,Qui cache chèvres et faisansQuand la chasse tire ses premières semoncesEn un tonnerre terrifiant.Quelques lapins s'arrêtent au pied du calvaire,Lèvent le nez, prennent le vent.Parfois s'y perd un vieux sanglier solitaireEn quête d'un gite accueillant.Souvent j'y viens finir mes longues promenades,J'y pose mes méditations.Je m'assieds et respire le vent qui gambadeDe croix en croix, en tourbillons.Je suis, de tous les hôtes de ce cimetière,Le seul à savoir que bientôtLes bulls effaceront sous des tonnes de terreJusqu'au souvenir des tombeaux.Car c'est ici que passera demain la route,Sur les tombes des aliénés.Si tu y roules un jour, fais silence et écouteLe triste chant des oubliés.