8 Décembre 2017
Un tour au festival du film d’éducation ce matin, le temps d’une table ronde intitulée « Réussir le lien avec les familles ». Impression d’un rebond sur le film que j’y ai vu la veille, « The florida project ».
Rien à voir pourtant a priori. « The florida project », c’est un film aux couleurs de chamallow, ou de Disney, je veux dire de Disneyland, pas de Blanche Neige. Une gamine paumée, aussi paumée que sa mère... Encore que ! L’une c’est Shirley Temple qui déclamerait de l’Audiard, l’autre une jeune femme qu’aurait pu croquer Steinbeck, mais qui n’oublie pas son Ipad dans sa dérive… La dérive du rêve américain résumée dans ce cocktail sucré qui nous percute et nous dérange.
Rien à voir avec le ton très France Culture des années 60 que prennent les intervenants de ce matin.
La table ronde démarre un peu lentement, avant d’emporter la salle remplie au point que l’on a dû en ouvrir une seconde où l’on suit le débat sur écran.
En un peu plus d’une heure et demie, les trois intervenants (Jean-Louis Auduc, Samuel Le Bas et Jean Jacques Lion) rappellent bien des choses, comme la connivence si difficile à trouver entre parents et école mais pourtant si nécessaire, ou encore la vitalité de la communauté éducative comme rempart au communautarisme…
C’est le collège que l’on évoque essentiellement, ce lieu ou plutôt cette période où l’enfant devient adolescent, où il commence à vouloir se détacher de ses parents sans encore le faire vraiment, où il aspire à l’intime et se répand pourtant sur les réseaux sociaux. On ne peut découper cet adolescent en tranches et, pour l’accompagner dans son entier, le collège n’a d’autre choix que tisser autour de lui un réseau dans la ville ou le quartier, un réseau qui inclut les familles.
En filigrane du propos, on devine que le collège est, par nature même, un établissement de proximité.
Je n’ai pu m’empêcher de songer alors au collège Pablo Néruda que des élus décident de fermer cependant que d’autres regardent ailleurs. Je n’ai pu m’empêcher de penser à tout ce maillage longuement tissé entre le collège et son quartier et que l’on allait déchirer et à ces familles qui s’étaient laissé apprivoiser jusqu’à une presque connivence avec leur école et qui n’oseraient sans doute pas traverser la ville pour affronter une autre école où elles ne se reconnaîtraient plus. J’ai songé à ces enfants et ces adolescents que l’on allait disséminer dans la ville, comme on sépare deux élèves dissipés dans une classe, et j’ai mesuré la violence de l'image qu’on leur donnait d’eux-mêmes et du quartier où ils vivent leur quotidien.
J’aurais aimé que soient présents ce matin à la table ronde ceux qui vont, lundi prochain, voter la nouvelle carte scolaire dans le département et qui confirmeront alors, entre autres, l’arrêt de mort du collège Pablo Néruda … Mais je finis par me convaincre que cela n’aurait finalement rien changé à leur posture qu’aucun argument ne parvient plus à ébranler. Je crains en effet qu’elle ne repose plus guère aujourd’hui que sur la peur de perdre la face, la peur que changer de pied puisse donner l’impression qu’ils auraient pris leur décision trop rapidement, sans prendre le temps d’en mesurer les enjeux…
Et perdre la face quand on se veut jeune loup de la politique !