27 Juin 2019
Un courrier circulaire de l’adjoint aux finances de la ville d’Evreux a réveillé la soif de réponses qui me taraudait lors du dernier conseil municipal.
S’agissant des affaires financières, j’avais en effet posé trois questions ce soir là sans obtenir de réponse, ou si peu.
La première concernait une incohérence dans le document soumis au vote. on y indiquait en effet un recours à l’emprunt de cinq millions d’euros au titre de l’année 2018. Mais, dans les annexes, à ces cinq millions souscrits auprès de la banque postale viennent s'ajouter trois millions souscrits auprès de la caisse d'épargne , soit huit au total.
Aucune réponse à ma demande réitérée d'explication … Et une présidente de séance qui veut m'interdire de parole quand j'insiste pour en obtenir une.
Dieu merci ! J'ai une voix qui porte, même sans micro.
Ma seconde question concernait les restes à réaliser de 2017.
Une brève digression pour expliquer au profane ce que sont les restes à réaliser. À la fin d'un exercice budgétaire, une partie des investissements a été engagée sans être totalement achevée et donc facturée.
Rien que de très normal.
Il s'agit alors de restes à réaliser qui se concrétiseront de façon certaine en dépenses et en recettes dans le courant de l'année suivante. Le vote du compte administratif acte ces restes à réaliser en dépenses mais aussi en recettes ; c’est-à-dire que, s'il est prévu de mobiliser de l'emprunt pour financer les travaux restants, le montant en est inscrit.
En 2017, les restes à réaliser dépassaient légèrement les neuf millions d'euros en dépenses et le recours à l'emprunt était prévu à hauteur de trois millions d'euros .
Ma question était donc simple. Si les trois millions d'euros tirés auprès de la caisse d'épargne n'existaient pas réellement , comme le suggérait l'adjoint aux finances en peine d'explication, et que leur inscription dans les annexes du compte administratif ne soit qu'une erreur matérielle, par quels mécanismes avait-on alors financé les restes à réaliser ? Subventions ? Autofinancement ? Recours provisoire aux OCLT, plus connus du grand public sous le nom de crédit revolving.
Pas de réponse, aucune explication… Et toujours la présidente de séance qui s'énerve.
Ma troisième question concernait les restes à réaliser 2018, inclus cette fois dans le document que nous devions voter.
De nouveau neuf millions en dépenses mais un recours à l'emprunt fixé cette fois à cinq millions. Qu'en est-il de cet emprunt. ?
Sur ce point particulier, j'obtiens enfin une réponse. Les cinq millions ont été intégralement mobilisés le 25 avril 2019.
Mais cette première réponse induit du coup d'autres questions, au grand dam de la présidente de séance qui piaffe et voudrait que cesse le calvaire de l'adjoint aux finances qui s'empêtre dans ses argumentaires.
En 2019, outre les 9 millions de restes à réaliser, ce sont seize millions supplémentaires de dépenses d'investissement prévus au budget. ces 16 millions ne seront sans doute pas intégralement dépensés mais tout de même... Ils ne le seraient qu'à moitié qu'il faudrait trouver 8 millions . Comment seront-ils financés, sachant que le gros de l'épargne que parvient à réaliser la ville sert au remboursement de l'annualité des emprunts ?
Je n'obtiens à nouveau aucune réponse .
Soit personne dans l'équipe municipale n'a anticipé cette question, ce qui me paraît peu plausible, soit on sait qu'il faudra un recours massif à l’emprunt et il n'est pas question d'avouer qu'on va faire repartir la dette à la hausse.
C'est que l'enjeu est de taille pour la municipalité sortante. A la fin de sa première année de mandat, la dette était passée d'un peu moins de 81 millions à plus de 83 millions. Il lui faut donc montrer qu'elle est capable de désendetter la ville tout en multipliant travaux et réalisations fastueuses
D'autant que la question de la dette fera plus que jamais partie des propagandes électorales parce que au-delà des mouvements de baisse ou de hausse, il y a désormais le poids croissant qu'elle représente par rapport à des recettes de fonctionnement en berne.
L'encours de la dette dépasse aujourd'hui le montant de l’ensemble des recettes de la ville.
Monsieur Lefrand a en effet transféré des compétences à l'agglo à marche forcée. Il a du coup transféré les recettes correspondantes , mais il a gardé les emprunts. Il perd par exemple les recettes liées à la petite enfance (paiements des familles et de la CAF...) Mais il garde la charge du remboursement du reliquat des emprunts contractés pour construire les crèches.
Il met du coup Evreux dans la situation d'un ménage qui aurait emprunté gros pour acheter sa maison en tablant sur un niveau de revenus... qui diminuerait soudain.
Avec de bonnes assurances, le ménage reussira peut-être à se sortir de ce mauvais pas, mais, pour la ville, ce qui lui tient lieu d'assurance ce sont les ventes de patrimoine et les impôts qu'il faudrait bien augmenter en cas de gros pépin.
En construisant, pour partie artificiellement, l’indicateur très optimiste que constitue la baisse de la dette à la date du 31 décembre 2018, et en le mettant d'ores et déjà en exergue pour sa campagne électorale, monsieur Lefrand et son dernier carré de fidèles espèrent rassurer nos concitoyens qui pour nombre d'entre eux commencent à s'interroger sur l'urgence qu'il y avait à accumuler des travaux fastueux quand il y a tant d'autres choses à faire.
Ils espèrent sans doute masquer ainsi des réalités budgétaires bien plus préoccupantes, et qui ressortiront immanquablement , dés le lendemain des élections, de la boîte où ils les confinent avec peine.
Cette boîte nous sommes quelques-uns à avoir tenté d’en lever le couvercle lundi soir en conseil municipal
Mais là où nous espérions un dialogue républicain au conseil municipal de ce lundi, nous nous sommes heurté tantôt à des arguties tantôt à un mur de silence. Un mur qui laisse pensif et qui laisse aussi place aux hypothèses les plus pessimistes.
Quant au courrier de l'adjoint aux finances qui nous explique que l'inscription des fameux trois millions dans les annexes n'étaient qu'une erreur matérielle imputable à la caisse d'épargne et au prestataire qui assure le suivi de la dette d'Evreux, il ne me rassure en rien parce qu'il pose finalement, on le voit, plus de questions qu'il n'en règle .