26 Juin 2024
Une de mes gammes mensuelles pour Pochade. Cette fois il s'agissait d'un excipit : terminer un texte bref par "ça croustillait sous la dent" Je me suis amusé à reprendre les personnages de Zeus et Prométhée dans la suite de l'exercice précédent : le pacte
Zeus songeait à la vanité du pouvoir en contemplant la précieuse Egide.
Qu’il était loin le temps où les abeilles le nourrissaient de miel et Amalthée d’ambroisie. Qu’elle était longue l’éternité, depuis qu’il avait quitté l’Olympe pour se réfugier sur les rives du Phlégéthon, chassé par les Hommes, cette espèce inconstante qu’avait modelée Prométhée.
Il l’aurait bien renvoyé sur le mont Caucase celui-là.
Zeus s’ennuyait. Il aurait préféré perdre son trône comme Cronos l’avait perdu, banni par ses propres enfants. Au moins étaient ils d’essence divine. Au moins étaient ils ses pairs.
Mais pour qui se prenaient ils ces hommes à qui un Titan avait donné le feu de la vie et qui s’étaient mis à créer toutes sortes de divinités évanescentes ; et qui l’avaient chassé, lui, le roi des dieux. Tout cela manquait de panache.
Il se demandait si, finalement, Cronos n’avait pas prévu cette fin pitoyable. Peut-être même s’était il rendu jusqu’au bout du temps et savait-il le sort qui attendait les dieux. Il se souvenait de la dernière fois où il l’avait vu avant de le faire jeter dans le Tartare. Le vieux, courbé, accroché à sa faux, vomissaient ses cinq enfants, puis la pierre que Rhéa lui avait donnée à dévorer à la place du sixième. Puis il l’avait regardé lui, Zeus, debout à côté de sa mère, la foudre vive à son poing.
- Te voilà enfin, fils lui avait-il dit. Je t’attends depuis si longtemps et je suis si fatigué.
Zeus avait courbé le front devant son père.
- Mais comment savais tu que te ne l’avais pas dévoré, avait riposté Rhéa, la mère, plus furieuse qu’étonnée ?
- Femme, avait alors répliqué Cronos, le rocher que tu m’as donné à engloutir à la place de ton fils, ça croustillait sous la dent