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Lettre à Elise, un débat télé sans saveur

Ma chère Elise,

Que dire de ce débat télévisé à trois qu’a organisé hier FR3 Normandie entre les trois candidats qui restent en lice à Evreux ?

C’est que le contexte de l’élection est très particulier. Sur les 26 000 électeurs que compte la ville, ils sont 16 000 à ne s’être pas dérangés pour le premier tour. Bien malin qui pourrait dire ce qu’ils feront au second… Et s’ils se décidaient à prendre le chemin des urnes, même les 1800 voix d’avance du maire sortant ne pèseraient pas bien lourd. Et puis, il y a eu le confinement, et il y a encore cette annonce d’un monde nouveau à venir. Alors chacun des candidats appliquait hier la stratégie qu’il croyait la plus adaptée à ces circonstances. 

Enfin, pas le maire sortant, Guy Lefrand, qui a juste fait du Guy Lefrand.

Il se l’est d’abord jouée façon Super-docteur venu à bout du covid après un combat acharné deux jours par semaine à la clinique où il exerce. Puis, ignorant superbement Guillaume Rouger, il a multiplié ses habituelles attaques ad hominem en direction de Timour Veyri qu’il voit comme son principal adversaire et à qui il faut reconnaître une sacrée patience. Un classique en tout cas que ces attaques méprisantes, voire méchantes que le maire alterne avec l’expression d’une incroyable autosatisfaction… Sans doute lit-il chaque soir un chapitre entier de ce bon vieil Emile Coué.

Guillaume Rouger quant à lui parie pourtant sur sa victoire … Je veux dire celle de monsieur Lefrand. Le voilà donc qui veut devenir chef de l’opposition future, ou en tout cas d’un groupe suffisamment conséquent, et qui tape comme un sourd sur Timour Veyri dont il veut réduire le costume à un supposé uniforme socialiste.

L’exercice en devenait compliqué pour le candidat de la gauche qui devait se garder tantôt à droite et tantôt … à droite.  

Il ne s’en tire pas si mal finalement et il réussit à parler tout de même un peu de l’avenir. De l’avenir, la ville de demain, celle qui s’inscrira dans ce monde de demain dont on a tant parlé durant la pandémie… Même si les discours présidentiels commencent à le ranger dans le placard aux illusions ce monde féérique là.  Mais Timour parle également du vrai demain, de ce lendemain où celles et ceux dont les deux mois de confinement se sont transformés en deux mois de galère ne sauront pas bien comment remplir leur frigo.

Au détour d’une question sur l’attrait nouveau que les parisiens, encore sous le stress du confinement, trouvent à l’immobilier dans une ville comme Evreux, monsieur Lefrand ne réussit à classer les Ebroïciens qu’en deux catégories, ceux qui cherchent à acheter autour de 150 000 euros et ceux qui veulent du luxueux pour beaucoup plus cher. Il ne compte évidemment pas ce quart de sa population qui vit autour du seuil de pauvreté et que le confinement a écrasé davantage encore. C’est Timour Veyri qui va porter leur voix, celle de ceux qui ont perdu leur intérim ou ces petits boulots aux frontières du black, mais qui leur permettait de survivre. Il évoque aussi la jeunesse et la débrouille d’étudiants que la pandémie a mis en galère….

 Monsieur Lefrand le rassure… Il a déjà tout réglé. En tout cas c’est ce qu’il laisse entendre. Il va créer 2 000 emplois au Long Buisson … Voilà qui remplira les ventres et les esprits ! Idem pour le commerce de proximité. Il a déjà tout fait. Il en a réglé déjà toutes les difficultés, avant même qu’ils aient pu réouvrir leurs portes.  Idem pour les questions d’environnement qu’il vient de finir de régler aussi. C’est qu’il en remontrerait aujourd’hui même à la ville d’Amsterdam question développement du cyclable par exemple! Grâce à lui, on pédale à présent à Evreux en parfaite sécurité entre les automobiles et on peut attacher son vélo aux centaines d’arceaux installés partout dans la ville. Idem pour le train. Tout va dorénavant pour le mieux, puisqu’il a tout réglé avec la Région dont il est vice-président.

 Le projet d’un tram-train entre Evreux et Rouen, et que porte Timour Veyri, ne l’emballe pas en revanche. Pour lui, la priorité des priorités, c’est en effet la quatre voies Evreux-Chauffour. Ah le bonheur de conserver même dans vingt ans le tout bagnole pour nos déplacements ! Le délice de ces caravanes de camions qui continueront de sillonner demain nos belles routes pour nous apporter des produits pas toujours bien utiles, mais arrivés de pays si lointains par avion-cargo qu’ils en auront des parfums d’exotisme !

Mais bien sûr, ma chère Elise, ces petits bonheurs du monde d’avant que monsieur Lefrand veut graver dans le bitume d’une quatre voies, ce n’est pas pour lui qu’il se propose de les dupliquer dans le monde d’après… Comme il le dit si bien, c’est « pour vous ! ».

Qui est ce « Vous » au juste, me demanderas-tu?

Je ne sais pas trop. Mais c’est peut-être dans le choix de la personnalité, que chacun des candidats a fait pour qu’elle lui affiche son soutien durant l’émission, que se trouve une partie de la réponse. Monsieur Lefrand a préféré une Ebroïcienne très sympathique et solidement ancrée dans le passé de notre cité où elle est arrivée il y a plus de cinquante ans. Timour Veyri a choisi pour sa part une Ebroïcienne non moins sympathique née il y a trente-cinq ans à Evreux dans le quartier de La Madeleine… Et qui a commencé d’y construire son avenir, jusqu’à diriger aujourd’hui sa propre entreprise.

Bien à toi

 

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