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Quatorze-juillet ... Pas de fumée blanche

Ma chère Elise,

Le gouvernement est toujours en place et il faudra bientôt que la nouvelle assemblée nationale procède à l’élection de son président.

Pour l’instant, les formations qui composent le nouveau front populaire ne se sont mises d’accord sur aucun nom, ni d’un éventuel premier ministrable, ni d’un candidat au perchoir. Je continue pourtant de leur faire confiance pour avancer sans perdre de vue le cap qu’elles s’étaient fixé ensemble, même s’il leur faudra sans aucun doute louvoyer. Je t’avais dit, ma chère Elise, dans un précédent courrier, ces deux écueils qu’il leur faudrait contourner. Et je veux croire que s’il n’y a pas encore d’accord sur une stratégie pour les mois à venir, il ne s’agit que de divergences sur la longueur et l’angle des bords qu’il faudra tirer.

Mais ce n’est pas de cela que je voulais te parler en ce lendemain du 14 juillet.

Tu es bien plus jeune que moi, et tu n’as pas connu ces 14 juillet qui marquaient autrefois le début des vacances, ni ces cérémonies patriotiques auxquelles nous préparaient nos maîtres à l’école. J’ai pour ma part la nostalgie du dernier jour de l’année scolaire où le maître de la classe nous emmenait en promenade sur des sentiers à travers champs et qui conduisaient à un petit bois gardé par un chêne imposant. Derrière se dressait la masse du crassier, cet amer qui, longtemps, a été au cœur du bassin de Longwy où je suis né.

Les maîtres étaient encore des « Instituteurs », du verbe latin instituere qui évoque la fondation. Sans doute est-ce parce que le rôle qu'à ses débuts la République avait assigné à l’Ecole était de fabriquer des républicains, c’est-à-dire d’accompagner ou de conduire les enfants pour qu’ils deviennent des citoyens à part entière, capables de comprendre les enjeux de la cité et de décider ensemble d’un destin qui ne se conçoit que commun.

Je suis loin d’être certain que l’Ecole soit encore aujourd’hui ce creuset où la République se construit jour après jour.

Et ce n’est pas seulement parce que l’on a voulu que « l’Instituteur » devienne « Professeur des Ecoles », et cela même si les mots ont leur importance. Ni parce que l’Ecole est de moins en moins le lieu du « Vivre ensemble », puisque les élites fréquentent de plus en plus celle de « l’entre-soi ». Ni parce que le discours des maîtres, qui n’était guère concurrencé autrefois que par celui du curé, est noyé aujourd’hui dans un flot continu d’informations qui, trop souvent, en appellent à la croyance plus qu’à la raison.

Je crains plutôt que ce ne soit tout cela à la fois, ma chère Elise, mais surtout que la République n’ait depuis longtemps perdu de vue, qu’au-delà de l’élévation du niveau de formation de la main d’œuvre que demandent les entreprises, elle a absolument besoin de l’Ecole pour sa propre survie.

Il faut qu’elle lui réassigne sa mission première de former des citoyens, sauf à accepter de continuer de se scléroser… et faire ainsi le lit de dictateurs en puissance.

Bien à toi

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